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Ludovic Debeurme on Bart Beaty’s Review of Lucille
posted November 25, 2006
[Original Article Referenced]
Je me permets de vous ecrire suite a votre article sur mon livre "Lucille".
J'ecrirais en francais, en effet je ne suis pas suffisamment a l'aise pour m'exprimer sur le sujet en anglais.
Je ne veux pas revenir sur l'ensemble de votre article. Ces appreciations etant les vôtres et la subjectivite du critique faisant echo a celle de l'artiste, je n'ai rien a redire. Meme si a l'occasion nous pourrions amicalement en discuter.
Je trouve meme constructive votre remarque sur la scene de bataille dans le bar, qui souleve un des aspects de la narration hors cases, qui comme tous systemes a ses avantages et ses defauts. Mais il est perfectible, et je travaille dans ce sens.
En fait je m'adresse a vous plus precisement au sujet d'un detail que vous citez et qui me semble errone. En effet vous ecrivez qu' Athur-Vladimir se sent responsable de la mort de son pere.
Ce n'est pourtant pas ce que l'histoire raconte.
Et c'est un detail qui a une grande importance dans la suite de la lecture du recit ainsi que dans l'imbrication des faits. Lucille est un essai sur la notion de transmission. Transmission familiale et heritage nevrotique. De la mere a la fille et du pere au fils (les personnages secondaires fonctionnent sur la meme thematique). Le nom que l'on transmet a sa mort etant un raccourci pratique et evocateur d'une malediction. Mais plus largement de l'idee de la chaîne qu'il faut rompre ou transformer pour survivre, ce qui est l'objet du second livre (il n'etait pas prevu qu'il y ait deux livres, mais je ne pouvais pas publier pour des raisons editoriales plus de 500 pages d'une traite!)
Arthur ne peut etre responsable de la mort de son pere puisqu'il est lui meme pris dans ce schema mortifere.
Meme si la dimension psychanalytique n'est pas loin, et je fais allusion moi-meme a la terminologie Lacanienne dans certains titres, et que votre idee de responsabilite ressentie par Arthur evoque le complexe d'Oedipe, ce n'est pas de ca dont il s'agit ici. De la meme facon que le suicide evoque dans Cefalus ou mes ailes d'homme est un suicide symbolique qui invite a une renaissance, la tentative de suicide d'Arthur n'a pas ici la meme fonction symbolique premiere.
La tension entre le suicide du pere et du fils n'est de fait pas la meme avec ou sans votre lecture. Arthur ne tente pas de se suicider parce qu'il se sent responsable de la mort de l'italien ou en amont de son pere, mais bien parce qu'il subit l'heritage et la terrible prediction de son nom.
Une partie de mon travail s'est dirigee vers la notion d'habitus et la culpabilite qui accompagne ceux qui tentent de franchir une barriere sociale familiale. Cette histoire de nom "offert" qui me vient d'une personne que j'ai connu et dont Arthur est directement inspire en est une illustration. De meme l'anorexie en est une autre. Ce qui m'interesse avant tout ce n'est pas l'anorexie et son côte spectaculaire, mais bien plus la transmission de la mere a la fille a travers la nourriture.
L'anorexie ou les troubles alimentaires sont une question qui me parle et que j'interroge dans mon travail plus largement, mais pas en premier plan. Cela serait comme inverser le symptôme et la cause.
Je voulais vous apporter mon sentiment sur ce point.
Merci de vous interesser aussi largement a la bande dessinee europeenne.
Bien cordialement
Ludovic Debeurme
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Bart Beaty Responds:
Dear Ludovic,
First of all, thank you for your fascinating letter. It is very rare that one sees an author's statement that really opens up new avenues for interpretation of a work, and I am happy to see this here.
Regarding our differing interpretations of the guilt felt by Arthur-Vladimir, you raise an interesting point. Re-reading my review, I see that what I was trying to suggest, more than a specific or nuanced reading of the text, is the fact that your book is looking at dealing with very serious issues. Of course, your letter has also made this very clear as well. The notion of transmission that you raise is very evident in the work, particularly in the twinning of Lucille and her mother in the final pages, but also throughout the work and, I think, more pronouncedly with relation to the relationship of Arthur and Vladimir, which tends to occupy a more central narrative position in the first half of the book. I have a strong suspicion that your theme will likely be more clear when the entire work is finished, which is one of the obvious drawbacks of reviewing the first half of a project as broad as Lucille.
Congratulations on your award nomination, and despite a few reservations about the first volume, I am very much looking forward to seeing how the entire work reads as a whole.
Bart